Retrouvez Knox et Jailyn ainsi que toute la bande de l’univers Pari Risqué pour un Noël avant l’heure fort sympathique.

⚠️ Avertissement : si vous n’avez pas lu Rainbow, cette scène contient des spoilers. Mais qu’est-ce que vous attendez pour le lire ? 😁

Noël avant l’heure

Knox

Un matin de décembre, vingt Dieux !

Ouais, un samedi matin de décembre, je me tapais les courses dans un supermarché bondé !!! Je ne savais pas si la neige qui recouvrait New York depuis deux jours avait incité les gens à se précipiter dans les magasins, mais ç’en avait tout l’air. Pour couronner le tout, une chanson de Noël entêtante vrillait mes tympans ; du rouge, du doré, du scintillant, une tonne de décorations brûlaient mes rétines ; et des gosses braillaient ou…… braillaient.

Ils achevaient mes tympans.

Ce mois de décembre allait avoir ma peau. Cette sortie ressemblait à celle du week-end précédent. Cruz et moi, on avait été cherchés un sapin et pas n’importe où ! Ma frangine avait décrété qu’il fallait lacheter à Brooklyn chez le vieux Max qui vendait les plus beaux de l’état. Bien sûr, Jailyn avait approuvé.

Le premier achat d’une looooongue série…

Avec ma petite nana, je m’étais aussi tapé toutes les courses, boules, guirlandes, bougies – la totale – dans un magasin envahi par des gens prêts à se sauter à la gorge pour une espèce de figurine à édition limitée, la dernière en rayon.

Une chose était sûre : les gens étaient vraiment cinglés ! La même scène s’était reproduite ici ! Deux meufs avaient été à deux doigts de se crêper le chignon pour un jouet quelconque, le dernier exposé également en rayon. Véridique ! Un vigile avait dû les séparer. L’espace avait failli se transformer en un ring de boxe.

Ouais, le monde était craignos ! Pire qu’au Black Friday. C’est dire ! Hallucinant !

Je continuais à pousser notre caddie plein. Jailyn m’avait entraîné dans tous les recoins possibles et imaginables. D’après ma moitié, il était important d’acheter certaines victuailles le jour même. Hors de question de les acheter en avance et de les congeler !

OK… Il fallait vraiment que je sois dingue d’elle pour endurer tout ça.

À cette minute, on avait dû parcourir le moindre mètre carré de ce fichu magasin, mais on arrivait au bout. On s’était enfin rapprochés des caisses !

ENFIN.

— Hé, Knox, regarde, ils ont des….

Le reste de ses paroles se fondit dans le brouhaha ambiant. Avec horreur, je vis ma petite nana foncer dans la direction opposée de ma délivrance : les caisses, la SORTIE. Je bifurquai pour la suivre avec un chariot qui commençait à faire des siennes au niveau des roues. Je leur avais déjà donné deux bons coups de pieds pour les débloquer. Au troisième, le caddie risquait d’atterrir à la ferraille.

Mes menaces silencieuses semblèrent faire leur l’effet, car il glissa de nouveau droit. Je pus rattraper Jailyn qui s’arrêta devant une tête de gondole.

  Comment j’ai pu les louper ! s’exclama-t-elle, éberluée. On est passés au moins cinq fois ici.

Ouais, je confirme ! Mais multiplie par dix, ma belle, et on aura le compte exact.

Je baissai les yeux vers « je ne sais quoi » emballé dans un carton, et je réussis à lâcher un « waouh, super ».

Soudain, j’entendis Jailyn éclater de rire et rivai mes yeux aux siens. Ses prunelles noisette pétillaient et ma poitrine enfla – comme ça, sans prévenir ! Ce genre de truc ne prévenait jamais. Parfois, les sentiments que j’éprouvais pour elle faisaient tellement enfler ma cage thoracique que cela aurait pu être flippant. Je la dévorai de tout mon saoul. Ses joues avaient pris une couleur poudrée rose, adorable ; ses cheveux soyeux brillaient sous l’éclairage agressif et ses lèvres formaient une moue amusée que j’eus subitement l’envie terrible de mordre.

Elle était magnifique.

Elle était à moi. Et ce sentiment possessif, intense, gronda dans mes veines. Putain, j’avais envie de me casser de ce magasin, de l’emporter dans mon lit…

— Tu ne sais même pas de quoi je parle.

Sa voix me ramena brutalement sur terre. Le brouillard dans mon cerveau s’éclaircit, laissant encore de grosses nappes ici et là.

— Je ne suis pas toujours tes délires avec Bethany, réussis-je toutefois à former comme phrase.

Elle rigola et se pencha pour me donner un bref baiser. Avant que je ne puisse glisser ma langue entre ses lèvres, elle recula avec un sourire espiègle.

— Jailyn…

Un de mes grondements primates !

Sans se soucier de mon état (un peu à cran), elle tendit le bras l’air de rien et attrapa un carton qui atterrit dans le caddie. Je pus voir ce que c’était en fin de compte : une tasse sur laquelle figurait une héroïne de Manga. Ma frangine s’amusait à les collectionner. Ouais… nouvelle lubie.

— Bethany est tombée sur une pub comme quoi il y avait un arrivage aujourd’hui. Elle m’a demandé de regarder si j’en trouvais une.

Vu ce qui restait en rayon, ils avaient été dévalisés. Elle me tapota la main.

— Encore une boite de chocolats et on aura fini.

Alléluia.

On passa encore dix bonnes minutes dans le rayon chocolat. Un rayon à donner une crise de foie rien qu’en posant les yeux sur tous les assortiments. Puis on se pointa enfin aux caisses où je pris mon mal en patience.

Au bout de quelques minutes, mon téléphone m’avertit soudain d’une notification.

Zack : je suis un peu à la bourre, j’aurai quinze minutes de retard.

Je souris : il n’y avait que Zack pour être aussi précis et prévenir pour un laps de temps aussi court.

Moi : Pas de problème, vieux.

— Zack aura un peu de retard.

Jailyn hocha la tête.

— OK… pas de souci. Je leur avais donné une heure approximative.

À trois semaines des fêtes de fin d’année, Jailyn avait organisé un repas de Noël avec Cruz, Bethany, Ryder, Kendra et Zack, sous prétexte qu’au réveillon, on serait tous invités à droite et à gauche dans nos familles respectives. Du coup, c’était le seul week-end de décembre où on était tous libres en même temps. De plus, j’étais certain qu’elle avait aussi prévu mon gâteau d’anniversaire avec un peu d’avance ; mon étudiante préférée adorait tous ces évènements : fêtes, anniversaires, etc. Elle avait également invité Chase, mais mon frangin avait un truc de prévu depuis des lustres. Impossible pour lui d’annuler. Toutefois, ce n’était que partie remise au 24 décembre chez ma mère.

Devant nous, la place se libéra. Le client récupéra son ticket de caisse et ce fut enfin notre tour. Jailyn tapa un peu la bavette avec la caissière tandis que je me démenais pour ranger (de nouveau) le caddie.

Une fois ma carte bancaire en poche, on se dirigea ensuite vers la sortie. La Mustang se trouvait à perpette et je crus que le caddie allait refaire des siennes. Jailyn me lança plusieurs regards amusés.

— Heureusement qu’ils ont salé le parking.

Je levai la tête vers un ciel gris et chargé.

— Oui… et vaut mieux pas traîner.

On arriva devant le coffre de ma voiture ; Jailyn me dévisagea d’un air innocent :

— Eh bien, tu vois, tu as surmonté un après-midi dans un supermarché !

Rapide comme l’éclair, je glissai ma paume autour de sa nuque et écrasai mes lèvres contre les siennes. Sa réponse ne se fit pas attendre : elle ouvrit la bouche, sa langue caressant la mienne. Rien à foutre si on se donnait en spectacle, j’avais envie de lui rouler une pelle depuis… un TEMPS FOU. Et vu sa réaction, elle aussi.

— Toi, tu vas passer à la casserole, grondai-je contre ses lèvres.

Elle gloussa.

— Très fin, M. Fowler !

— On rentre !

Mon ton était limite flippant.

En un temps record, je balançai les courses dans le coffre. Je n’avais qu’une envie : me retrouver seule avec ma gonzesse. Une fois au volant, j’entendis son téléphone vibrer dans sa main.

— Bethany vient d’arriver à l’appart, elle nous attend.

Merde ! Déjà ? Cela bousillait tous mes plans.

— Elle me prévient que Cruz est en route, il a quitté plus tôt le boulot.

Elle tourna la tête vers moi avec un grand sourire lumineux.

— Tous les deux, vous pourrez vous occuper des toasts.

J’étouffai un soupir : le monde entier se liguait contre moi.

— Cruz devrait arriver avant nous. Préviens-la qu’on arrive d’ici trois bons quarts d’heure.

Jailyn éclata de rire en comprenant mon allusion. Ouais, je n’avais pas envie de me retrouver devant une scène indélébile. J’avais vécu deux ou trois traumatismes de ce genre depuis que Cruz, mon meilleur pote et coloc, sortait avec ma frangine. Malgré moi, un sourire se dessina sur mes lèvres lorsque je la vis se marrer de plus belle.

Finalement, il nous fallut une bonne heure pour atteindre l’appart, la circulation étant des plus merdiques sur Manhattan. Une fois que j’eus garé ma caisse en double file, Cruz et Bethany descendirent nous aider à monter les courses. Jailyn serra ma frangine dans ses bras avec affection. Toutes deux s’entendaient super bien et partageaient les mêmes délires. Je n’aurais pu rêver mieux entre elles.

Mes yeux s’attardèrent sur ma sœur. Ses cheveux blonds lissés, son maquillage plus prononcé en vue de cette soirée, sa mini-jupe en velours, ses collants noirs, lui donnaient quelques années de plus. Et ses bottes à talons plats complétaient son petit style bien à elle.

Merde, à chaque rencontre, j’avais l’impression qu’elle changeait. Je me souvenais encore d’elle avec ses tresses. Bonjour le coup de vieux soudain !

Cruz attira mon attention. Vu ses œillades prolongées, mon coloc appréciait vachement ce qu’il voyait.

Mayday, Mayday

Ma frangine me sauva de mon délire.

— Alors, frangin, t’as survécu à l’enfer d’un samedi ?

Ma tronche lui arracha un rire. Je la serrai également dans mes bras avant qu’elle ne se tourne vers le coffre. Cruz arriva à ma hauteur, aussi hilare.

— Ferme-la, je veux pas t’entendre, balançai-je avant qu’il ne prononce un mot. Les gens sont dingues.

— Enfermé dans ton studio d’enregistrement, tu découvres ça aujourd’hui, mon vieux ?

— Non, mais j’avais encore un infime espoir.

— Bah, traîne sur les réseaux sociaux… et tu auras une bonne idée des excités qu’il peut y avoir de nos jours.

Il n’avait pas tort. Sur ce, il empoigna au moins cinq sachets sous les yeux admiratifs de ma petite sœur. Au passage, je captai le clin d’œil de mon pote dans sa direction.

Quel frimeur, celui-là !

Et une autre lueur… oh, bordel !

Je pivotai illico pour m’occuper des derniers sachets à prendre. Il y avait des trucs qu’un frangin préférait ignorer.

Un quart d’heure plus tard, ma Mustang était garée dans le parking que je louais et les courses étaient posées sur la table de la cuisine. Bethany avait allumé le sapin dans le salon et, près de la fenêtre, Jailyn et elle s’extasiaient devant les flocons qui tombaient de nouveau sur NY. Excitées comme des gamines.

Cela me fit sourire.

Je jetai un coup d’œil vers la télévision et m’aperçus soudain qu’il était déjà quinze heures. Cruz me rejoignit au même moment avec une bière dans chaque main.

— T’es sorti tôt, dis-je en saisissant la bouteille qu’il me tendait.

— Je m’étais arrangé avec mes rendez-vous !

En buvant une première gorgée, je vis Jailyn traficoter sur son portable. Quelques secondes plus tard, la première chanson de sa playlist du groupe Onyx se répandit dans le salon.

Onyx… Nouvelle obsession de ma frangine et Jailyn. Quand on connaissait les obsessions de ces deux nanas, on en bouffait Cruz et moi du dernier album de la bande de Kade Snyder***.

A.Toutes.Les.Sauces. Pire que Katy Perry.

Heureusement que les mecs étaient bons.

Puis montées sur ressorts, les filles commencèrent à préparer la dinde à enfourner avec en accompagnement un gratin de pommes de terre. Dans ce genre d’occasion, Jailyn adorait cuisiner et mettre les petits plats dans les grands. Cruz et moi, on fut réquisitionné pour préparer les toasts – après une formation de dix minutes.

Et on avait intérêt à faire ça proprement !

Jailyn et ma frangine s’activèrent ensuite sur les entrées dans une ambiance festive où on déconna, rigola tous les quatre.

— Cruz, coupe le saumon droit !

— C’est ce que je fais, chica !

— Alors, plus droit.

Il gloussa.

— Tu ne m’avais pas prévenu que ta frangine pouvait être aussi intraitable, chuchota-t-il.

Je ricanai :

— Tu l’as voulue, mec ! Tu te démerdes avec maintenant.

Il étouffa un rire.

Cruz et moi, on avait retrouvé notre complicité comme au premier jour. Il rendait ma frangine heureuse et elle de même. Eux deux, c’était une telle évidence à présent que je m’en voulais encore aujourd’hui de ma réaction violente envers lui.

Il ne m’en avait jamais tenu rigueur. Quand j’avais essayé de lui en toucher un mot, il m’avait coupé direct en me disant « que s’il avait eu une petite sœur, sa réaction aurait été dix fois pire »… Ouais, même là, il avait été à la hauteur : aucune rancune, aucun reproche… Au contraire. J’avais eu les boules, réalisant une nouvelle fois ce que j’aurais pu perdre avec mes conneries, mes peurs infondées.

Ma gorge se serra à ce souvenir et je me jurai pour la centième fois d’être digne de lui, de son amitié. La voix de Jailyn me sortit de mes pensées tumultueuses.

— Ne mets pas trop de terrine, Knox. Ce ne sont pas des casse-croûtes que tu fais.

Je croisai le regard de Cruz et on se retint d’éclater de rire. Je répondis d’un ton innocent :

— Tu connais Ryder, c’est un morfal !

— Il a bon dos, Ryder, rétorqua-t-elle aussi intraitable que ma frangine.

Un peu, oui…

Mais un sourire se dessina sur ses lèvres.

On acheva les préparatifs avant de migrer dans le salon. Les filles venaient de changer la playlist pour passer à… attention, retenons notre souffle… On avait eu de la chance avec Onyx, mais elle ne tombait jamais deux fois au même endroit ! Fallait pas se faire d’illusions.

Tout à coup, la voix de Mariah Carey All I want for Christmas is you sortit de la barre de son, le volume un cran au-dessus. Les filles se mirent à se trémousser sur place près de la fenêtre, tout en poussant la chansonnette. De concert, leur poing devant la bouche en un micro imaginaire, elles pivotèrent vers Cruz et moi plantés près du canapé, nos regards braqués sur elle.

All I want for Christmas is you, baby (tout ce que je veux pour Noël, c’est toi, bébé).

Jailyn pointa son index dans ma direction ; Bethany dans celle de Cruz. Celui-ci se marra de bon cœur et mon rire se joignit au sien. Un clin d’œil fit rougir ma moitié quand mon regard descendit le long de son haut et jean moulants avant de plonger dans ses yeux. J’articulai :

« Moi aussi ».

Je m’approchai lentement pour l’attirer contre moi, ma bière à la main. Se coulant dans mes bras, elle noua les siens autour de ma nuque et ses lèvres caressèrent ma bouche dans un chuchotement sensuel :

— All I want is you (tout ce que je veux, c’est toi).

J’allais l’embrasser quand la sonnerie de la porte d’entrée retentit.

Bordel ! Décidément !

Jailyn me donna un baiser rapide, prête à accueillir nos invités en parfaite maîtresse de maison, et je la lâchai à contrecœur. Cruz se dirigeait déjà vers le hall. Quelques secondes plus tard, j’entendis une grande gueule familière :

— Yo, mec ! ça gaz ?

Le meilleur arrivait.

Kendra semblait hilare lorsqu’elle apparut dans le salon avec Ryder, leurs mains jointes. Je ne sais pas quelle connerie ce dernier venait de lui dire, mais elle gloussait encore. Étonnant. Ce n’était plus la même nana. Bien sûr, l’ex de Dillon avait son caractère, sa personnalité, elle était très loin d’avoir la spontanéité de ma frangine ou de l’amour de ma vie, mais elle était plus chaleureuse avec notre bande. À présent, elle avait bien sympathisé avec les filles. D’ailleurs, elle lâcha Ryder pour leur faire un hug amical l’une après l’autre, avant de tendre un paquet à Jailyn. Celle-ci la remercia d’un grand sourire et s’empressa de l’ouvrir. Ravie, elle découvrit un lot de bougies.

OK… Je sentais bien qu’elles allaient atterrir dans ma piaule, comme plein d’autres choses… Quand une nana avait une passion – n’importe laquelle –, son mec avait intérêt à se tenir prêt à l’invasion d’un tas de trucs, dans les moindres recoins de sa chambre : livres, Pops, bougies et j’en passe.

Ce qui me dépassait le plus, c’est que Jailyn était capable de relire dix mille fois un livre s’il faisait partie de ses coups de cœur. Les films ? N’en parlons pas ! À connaître la moindre réplique !

Je l’entendis s’extasier de cette voix parfois candide qui provoquait toujours un tas de choses dans ma poitrine :

— Oh, ce sont mes préférées, merci Kendra. Je les adore.

Elle la serra contre elle et la jolie gothique, habituée à présent aux marques d’affection spontanées de Jailyn et de Bethany, l’étreignit avec un sourire.

— Alors, mon fan-club, quoi de neuf ? s’exclama Ryder, avant d’ouvrir ses bras comme Moise devant la mer Rouge, pour les serrer contre lui toutes les deux en même temps.

Jailyn et Bethany (le fan-club dans sa totalité) pouffèrent (ouais, il avait toujours cet effet sur elles). Kendra leva les yeux au ciel et rigola en croisant mon regard.

— Je te débarrasse de ton manteau ? lui proposai-je.

— Merci.

Elle l’ôta, puis me le tendit.

Au niveau style vestimentaire, Kendra était à des années-lumière de Ryder. Ce soir, elle avait opté pour un pantalon qui ressemblait plus à un legging, avec des trous et plein de chaînes un peu partout, et un bustier à lacets qui laissait apparaître une petite bande de peau. Les mèches de ses cheveux – bleues depuis peu – prenaient des reflets intenses sous la lumière. Les deux-là formaient un couple détonnant, mais ça marchait du tonnerre entre eux.

Quand je revins du hall où j’avais été accrocher le manteau, Ryder pivota vers moi d’un air moqueur :

— Quoi de neuf, mec ? Tu t’es tapé les courses, un samedi ?

Bethany avait un grand sourire derrière lui.

— Ça fait rire tout le monde à ce que je vois !

— Ben, on va pas perdre une occasion de se foutre de toi, hein ?

Quel enfoiré.

— Et ta caisse ? Toujours au garage ?

— Outch, ça c’est un coup bas, Knox, jeta-t-il faussement blessé.

Il avait eu une panne récente. Cela s’était transformé en un drame national, bien sûr.

— Mais je récupère bientôt mon bébé, rétorqua-t-il excité.

Sa voix descendit d’une octave.

— En attendant, on se tape la Chevrolet…

— Je t’entends !

Kendra pointa un doigt menaçant dans sa direction.

— Et n’insulte pas ma voiture. Je te laisse déjà la conduire, ne grille pas toutes tes cartes.

Ryder n’eut pas le temps de répondre, car Jailyn s’avança les yeux écarquillés vers sa moitié avec une exclamation admirative :

— Oh ! Mais dis donc, Kendra, c’est un nouveau tatouage ! Il est magnifique.

Sur son avant-bras droit, je remarquai des lettres très fines, en écriture celtique.

— Ryder, lut Bethany qui s’était également rapprochée.

Ma frangine échangea un regard complice avec Cruz avec cette lueur dans les yeux : « Ouais, mon mec est le plus talentueux des tatoueurs. »

Ryder, fier comme un paon, tendit également son bras sur lequel on retrouvait un tatouage dans le même style, en écriture celtique. Un design fin, mais un peu plus masculin.

— Yep… j’avais demandé à Zack et Cruz de se taire, expliqua-t-il.

Mon attention revint sur Kendra. Je ne l’aurais jamais vue porter le nom d’un mec sur elle. Qui que ce soit. Même Ryder, à vrai dire ! Je ne l’aurai jamais vu marquer sa peau à vie pour une nana.

Ces deux-là arrivaient encore à me surprendre.

— Waouh, ils sont vraiment très jolis et discrets, c’est le genre de tatouage que j’aime, complimenta Jailyn.

Ryder eut un de ces sourires radieux.

— Oui, je voulais vous faire la surprise…

Cruz ricana en glissant ses bras autour de la taille de ma frangine, son torse appuyé contre son dos :

— Tu veux que je raconte à tout le monde comme tu chouinais comme un gamin dès qu’on approchait les aiguilles de ta peau ?

La réponse de Ryder se résuma en un majeur dressé.

— Oui, il était un peu douillet, renchérit Kendra.

Elle cachait mal son hilarité.

— Pas du tout, protesta le concerné, outré jusqu’au trou de balle, faisant des tonnes.

— Si ! Tu m’as presque broyé la main. Tu sais comme ces femmes qui accouchent, en pleines contractions.

On éclata tous de rire.

La main sur le cœur, il s’exclama :

— Putain, Kendra, tu pourrais me soutenir, au moins !

Dans la foulée, il crocheta son cou avec son bras et frotta son nez dans ses cheveux, lui arrachant des petits cris étouffés. Elle essaya de se dégager (bien faiblement), morte de rire.

— Cruz ne dit que la vérité, mon cœur

Bon sang, cela me faisait toujours drôle d’entendre des mots doux sortir de sa bouche, l’ex de Dillon en plus. Ça n’avait jamais été comme ça entre eux. Plus je la voyais avec notre pote, plus je réalisais à quel point sa relation avec notre future rock star avait été bancale.

— Où est le chef ? demanda soudain Ryder.

— Il a averti qu’il aurait du retard.

Il me regarda d’un air amusé.

— Quoi une heure, deux heures ? se moqua-t-il.

— Un quart d’heure.

Il se bidonna.

— Je me disais bien.

Puis il se tourna vers Jailyn.

— Hé, ça manque de musique, ici !

Ni une ni deux, une chanson choisie sur son téléphone s’échappa de la barre de son. Les yeux fixés sur sa moitié, il s’approcha, glissa un bras autour de sa taille, la plaqua contre lui, l’obligeant à suivre le mouvement de Jerusalema sous le regard attendri de Jailyn. Cela dura quelques minutes jusqu’à ce que la sonnerie de la porte d’entrée retentisse de nouveau. Bethany devança Cruz et je réussis à entendre la voix de Zack :

— Salut, ma belle, comment tu vas ?

Il apparut dans l’encadrement du salon avec un bouquet de fleurs. Derrière lui, Cruz tenait une bouteille de champagne entre ses mains. Zack tendit les fleurs à Jailyn avec un grand sourire.

— Oh, merci, Zack, elles sont magnifiques ! s’exclama-t-elle avant de l’étreindre avec affection.

Elle recula de quelques pas.

— Je vais les mettre dans un vase. Qu’est-ce que tu veux boire ? On a prévu un vin blanc pour l’apéritif ? On servira le champagne au dessert ?

— C’est parfait.

— Je m’en occupe, jeta Cruz se dirigeant vers la cuisine, suivi de Jailyn.

Ryder eut droit à une tape dans le dos, Kendra, un hug amical. On se fit un check. Ryder se rapprocha de lui et posa une main sur son épaule.

— Au fait, elle est où ta meuf, Zack ? J’ai cru que tu allais nous la présenter, ce soir !

Ah, notre pote y avait droit régulièrement ! Maintenant que Ryder était en couple, il était inconcevable pour lui que Zack soit célibataire. Quelque chose clochait. Ce n’était pas dans l’ordre des choses et il fallait y remédier : un truc dans ce goût-là. Lui aussi avait ses obsessions. Et le pauvre Zack en faisait partie.

— Je t’aurais bien présenté Paige, la sœur de Kendra, un petit canon (il adressa un clin d’œil à sa moitié qui lui sourit), mais elle sort avec un mec qui, je dois l’avouer, est vraiment sympa.   

J’eus un curieux sentiment lorsque Zack ouvrit soudain la bouche, puis sembla se raviser, avant de la rouvrir en rigolant :

— Quand est-ce que l’envie de me caser te passera ?

Sur le coup, j’eus l’impression que ce n’était pas les paroles qu’il avait voulu prononcer, mais il se tourna vers Bethany avec un autre grand sourire.

— Dis donc, les filles, ça sent vachement bon !

L’impression s’envola.

— Tu t’occupes des verres, Knox ?

Cruz venait d’apparaître avec la bouteille de Chardonnay, accompagné de Jailyn qui s’avança vers la table basse du salon pour y déposer son vase. Elle pivota ensuite vers Zack.

— C’est une des recettes de ma mère.

— J’ai hâte de goûter ça, répondit-il avec un clin d’œil.

Puis il se tourna de nouveau vers ma frangine.

— Alors, Bethany, l’école ?

— Ça va. En janvier, je démarre mon nouveau stage dans un service néo-natal.

Ils commencèrent à discuter. De mon côté, je pris les verres dans le meuble niché dans un coin de la partie salle à manger. Ensuite, j’allai chercher les toasts. On se retrouva tous autour de la table basse du salon, sur le canapé ou par terre. Cruz servit le vin blanc et on trinqua ensemble. La conversation ne tarit pas une seule seconde entre nos boulots, respectifs, l’école pour les filles, nos projets.

— Zack, tu fêtes Noël chez tes parents ? questionna Jailyn.

— Oui, Shaun sera là aussi.

— Il a accepté de venir ? ne pus-je m’empêcher de lui demander.

Personne n’ignorait que la relation entre son petit frère et leur père, en particulier, était tendue.

— Oui, et j’ai briefé mes parents, lâcha-t-il succinctement.

Traduction : son père avait intérêt à faire des efforts. Je hochai la tête.

— C’est super que Shaun vienne à New York, tu sais s’il a un petit ami ? continua Jailyn avec une lueur espiègle dans les yeux.

Shaun était le frère que Jailyn n’avait jamais eu. Depuis leur première rencontre, elle avait développé une affection particulière pour ce jeune. Je savais d’ailleurs qu’ils se parlaient régulièrement sur les réseaux sociaux. La dernière fois qu’elle avait discuté avec lui, il n’était pas certain de revenir pour ces fêtes. Son grand frère avait su se montrer convaincant. Comme toujours.

— Pas que je sache, répondit Zack en gloussant.

Il embraya d’un ton plus sérieux :

— Mais il ne s’épanche pas beaucoup sur sa vie sentimentale. Il reste quelques jours chez moi et repart le vingt-neuf. Il a prévu de passer le Nouvel An avec des potes du campus.

De notre côté, toute la bande le fêtait au Nine qui avait organisé une soirée spéciale.

— Dommage, j’aurais bien voulu le voir, répondit Jailyn. On passe le réveillon chez la mère de Knox, puis le vingt-cinq, on va chez mes parents. On a prévu de rentrer le vingt-neuf dans la journée. Knox a enfin pris quelques jours de congés, rajouta-t-elle en me lançant un petit coup d’œil appuyé qui me fit rire dans ma barbe.

— Ce n’est que partie remise, Jailyn, consola Zack.

Avec soulagement, je remarquai que notre pote avait évité d’embrayer sur Tiphaine. Celle-ci avait dû quitter Juilliard après ses tests ratés suite à sa blessure. D’après leur mère, les premières semaines avaient été difficiles. Mais c’était Tiphaine, une battante, elle rebondirait, j’en étais certain. Et elle aimait trop le violon pour abandonner sa passion. Mais bien sûr, cela affectait Jailyn. Juilliard et une belle carrière de violoniste avaient été le rêve de toujours de sa frangine. D’ailleurs, elle lui téléphonait très régulièrement, ainsi que Bethany.

— Oui, il faudra organiser ça.

On embraya sur un autre sujet avant de s’installer autour de la table de la salle à manger. Les entrées, le repas furent délicieux. Entouré de ma petite nana, de mes potes, de ma sœur, je passai une superbe soirée avec une musique de fond, le sapin illuminé plongeant l’appart dans une ambiance intime et la neige tombant plus dru sur la ville. Les blagues fusèrent de part et d’autre. Plus tard, on décida de prendre le dessert dans le salon, une fois les couverts débarrassés et rangés dans le lave-vaisselle.

Je rejoignis Jailyn près de la fenêtre, le regard perdu sur la nappe blanche qui recouvrait à présent la route. Je glissai mes bras autour de sa taille et appuyai mon menton sur son épaule. Elle posa ses mains sur les miennes et inclina sa tête contre ma tempe. On resta silencieux, appréciant ce moment de tendresse entre nous.

— C’est beau, paisible, dit-elle à voix basse.

— Oui…

Mon nez effleura son oreille d’une douce caresse.

— Mais j’ai la chance de tenir dans mes bras le plus beau trésor de cette ville.

Je la sentis émue par mes paroles.

— Tu me rends tellement heureuse, Knox…

Je déposai un doux baiser dans son cou et elle pivota, serrée contre moi. Je l’embrassai avec douceur, tous deux seuls au monde. Puis Jailyn écarta légèrement son visage, ses bras autour de ma taille.

— En venant à New York, je t’ai trouvé toi et une deuxième famille.

Je suivis son regard. Bethany discutait avec Kendra assise à côté de Ryder, blottie contre Cruz en grande conversation avec Zack et le pitre de la bande. Oui… c’était ma famille de cœur.

Je posai un baiser sur le crâne de Jailyn.

Au même moment Bethany se leva, disparut dans la cuisine et revint avec le gâteau d’anniversaire entre ses mains. Je ne m’étais pas trompé, je savais que ma petite nana allait profiter de cette soirée pour marquer le coup. Tous les deux, on avait prévu le 5, jour de mon anniversaire, un resto en tête à tête pour l’occasion.

J’eus droit à la chanson traditionnelle « Happy Birthday ».

— Hey, Bethany, combien de bougies t’as mis ? s’écria Ryder quand elle le posa enfin sur la table basse. Aux dernières nouvelles, ton frangin n’a pas quarante ans.

— Il n’y a pas quarante bougies, Ryder, répondit ma sœur avec la patience d’une mère devant un sale gamin.

— On dirait, attends, laisse-moi compter…

En pouffant, elle donna une tape sur la main qu’il tendait. Jailyn se mit à rire et je secouai la tête d’un air faussement désespéré.

— Faut surtout pas qu’il change, chuchota-t-elle.

— Il n’amuse que toi et Bethany, déclarai-je avec une parfaite mauvaise foi.

— Quel menteur, protesta-t-elle, les yeux pétillants.

— Bientôt, il va vous refiler des cartes de membre de son fan-club.

Elle s’esclaffa.

— Jaloux, va.

Cruz arrivait avec la bouteille de champagne. Très organisée, Jailyn avait déjà entreposé les flûtes sur un plateau. Je pris sa main.

— Viens avant que Cruz lui verse le champagne sur la tête.

Bethany se chamaillait avec Ryder devant un Zack amusé, une Kendra indulgente, un Cruz peut-être sur le point de lui briser finalement la bouteille sur la tête.

— Knox, je peux souffler les bougies avec toi ? Hein oui, hein oui ?!!!

— Ryder ! s’écrièrent Bethany et Kendra d’une même voix. C’est PAS ton anniversaire ! rajouta cette dernière.

Question sévérité on repassera, elle était morte de rire.

— Bon, OK, une bougie si tu veux, céda Bethany.

Oh, bon sang ! Comme il arrivait à les mettre toutes dans sa poche. Incroyable.

Jailyn et moi, on prit place sur le canapé. Je soufflai les bougies avec Ryder (ouais !), puis on dégusta une part de gâteau, trinqua de nouveau, le champagne au demeurant excellent. Zack avait le nez fin. On déconna encore bien, puis Jailyn se leva soudain.

— J’arrive, murmura-t-elle.

Peu après, je la vis revenir avec un cadeau emballé. Assez imposant.

— C’est de la part de tous.

Surpris, je me levai.

Quand je découvris ce qu’il y avait à l’intérieur, mes yeux s’écarquillèrent et ma gorge se serra d’émotion. Une guitare acoustique dotée d’une table en cèdre, une caractéristique qui lui permettait d’offrir les sonorités chaudes et rondes. Le must du must. Ce modèle coûtait une blinde.

J’en restai à court de mots et il me fallut quelques secondes pour pouvoir leur faire face. Mes potes, ma frangine, ma petite nana, ils me souriaient tous avec chaleur. Ma gorge se noua encore plus.

— Merci…

Ma voix se brisa légèrement sur la dernière syllabe. Jailyn glissa un bras autour de ma taille.

— Merci, répétai-je en la regardant, elle est magnifique…

— J’ai demandé à Miles de me conseiller et tout le monde a tenu à participer.

Cela m’émut encore plus de constater que Jailyn et Miles nouaient des liens plus forts, petit à petit. Dans ses yeux, je devinai qu’elle eut une pensée pour Bailey à cette seconde.

Avec affection.

Sa meilleure amie disparue dans un accident serait toujours là, en elle. Cette année, on irait sur sa tombe pour les fêtes et comme chaque fois, Jailyn lui raconterait les derniers évènements, potins… Il y aurait des rires, des sourires et… des larmes aussi. Mais des larmes différentes à présent, dénuées de culpabilité.    

— Hé mec, joue-nous un morceau, s’écria Ryder en jetant un coup d’œil rapide à Jailyn. Que je n’ai pas raclé les fonds de tiroir pour rien.

J’éclatai de rire, ce moment plus lourd se diluant dans l’atmosphère. Je rencontrai son regard et il me fit un clin d’œil… Ouais, derrière cette façade de rigolo, il y avait ce mec intelligent, rempli d’empathie. Je glissai mon bras le long des épaules de Jailyn, la serrant contre moi avec tendresse, et m’adressai à tous d’une voix rauque :

— Merci, elle est magnifique. Et merci d’être là, dans ma vie, de pardonner mes erreurs, mes conneries.

Je remarquai les cils humides de ma sœur. Et la lueur d’émotion dans les prunelles de Cruz quand je posai mes yeux sur lui en particulier. Il eut un hochement de tête imperceptible : « toujours, mec, toujours ». Je tournai mon visage vers Jailyn, la personne la plus importante de ma vie

— Et si Wade et Holly étaient là, je les remercierais cent mille fois pour t’avoir placée sur mon chemin. J’ai une dette éternelle envers eux.

Ses yeux s’embuèrent.

Et doucement, mes lèvres se posèrent sur les siennes sous des sifflets et encouragements. Ce fut un baiser doux et intense à la fois, exprimant ce qu’aucun mot ne pourrait jamais lui dire. Je me redressai, submergé par mes sentiments pour cette superbe fille dont j’étais raide dingue. Une petite larme perla sur un cil. Dans ses prunelles, je lus la même émotion.

— On veut une reprise de Rainbow de Onyx, s’écria soudain Bethany avec enthousiasme.

Ryder approuva d’un vigoureux mouvement de tête.

— Ouais, Onyx c’est pas mal, même Kendra apprécie…

Celle-ci lui envoya un coup de coude et Ryder se bidonna avant de l’attirer à lui et l’embrasser sur la tempe.

Rainbow…

La performance de Kade, Cole, Davin et… Miles, vue un million de fois sur YouTube par Jailyn et Bethany (à elles seules), le concert où Snyder l’avait chantée pour la première fois en public. D’un air faussement sérieux, je regardai tour à tour ma frangine et ma petite nana toute excitée.

— La guitare, c’est un piège, c’est ça ? Pour m’obliger à me taper tout le répertoire du groupe ?

— Peut-être, gloussa Jailyn d’une façon adorable.

Je rigolai, me penchai pour lui voler un autre baiser, puis je pris place sur la chaise qu’on avait ramenée de la cuisine.

— Alors, va pour Rainbow…

Des applaudissements et des sifflements résonnèrent jusqu’au fond de NY… Certainement.

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*** Kade Snyder chanteur et leader du groupe Onyx de Rainbow

J’espère que vous avez aimé retrouver toute la bande de l’univers de Pari Risqué. Je vous souhaite de très bonnes fêtes de fin d’année.

N’hésitez pas à me mettre un petit commentaire ci-dessous.